Remontée fulgurante
Depuis que nous avons quitté Carriacou le 3 février, nous avons sacrément accéléré notre rythme!
430 milles nautiques en 6 semaines alors que nous avions passé 9 mois dans un rayon de 200 milles...
Depuis le départ de Carriacou, nous avions envie d'explorer de tout nouveaux coins. Car, on vous l'apprend peut-être, nous prévoyons de traverser l'Atlantique vers les Açores au mois de mai! On voudrait donc vite vite profiter des joyaux restants des Antilles et se rapprocher d'une ligne de départ assez Nord.
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Bon, passons sur l'escale forcée à la Martinique pour raisons techniques, ça fait partie des moments de déprime qu'on ne relate pas forcément avec de jolis photos dans un blog...
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Nous quittons la Guadeloupe le 10 mars, après une nage inoubliable avec les dauphins!
Pour la première fois depuis longtemps, nous partons au portant! (c'est-à-dire avec le vent venant de l'arrière, une allure plus confortable) Allez, motivés pour enchaîner les milles, faire des nuits et grimper le plus haut possible! On est encore sans pilote automatique, mais on a notre fidèle Jules-le-régul qui barre au vent. Bon, il a un peu de mal car la mer est assez forte et nous fait faire des aulofées (des embardées) et on casse quelques bouts de ficelle...
On passe l'île de Montserrat à la tombée du jour. On évite de trop s'en approcher en raison d'une activité volcanique persistante de sa Soufrière; une éruption a recouvert tout le sud de l'île de lave et de cendres en 1995, et une suivante en 1997 a détruit la capitale Plymouth. Les guadeloupéens se souviennent aussi de la dernière explosion en 2010 qui leur a valu 5cm de cendres sur leurs terrasses.
On continue la remontée de nuit avec un bon vent établi à environ 25 noeuds, toujours au grand largue. On passe Nevis, puis St Kitts de nuit, tant pis, on reviendra peut-être plus tard, là on voudrait monter. Au petit matin, au large de St Eustache, des dauphins accompagnent mon quart. Je guette le cliché, doigt sur la détente, et capture ce merveilleux saut que j'offre aux poissons nés un 11 mars :)
Nous arrivons au bout de 24h à Saba, une île minuscule dont les 2000 habitants vivent entre 200 et 700m au-dessus du niveau de la mer. On a entendu que c'était une petite perle des Antilles. On finit par attraper une bouée car les falaises font plonger les fonds trop profonds pour jeter l'ancre à une distance raisonnable de la côte. Mais l'unique "plage" pour débarquer s'avère impraticable: des galets, en pente forte, avec la houle qui explose dessus. Puis 800 marches pour attendre la première route. Et pas de transports en commun, encore moins un dimanche... tant pis, on ne peut pas tout faire! On s'accorde une bonne après-midi de repos après cette nuit de quarts, film en famille!
Le lendemain, lundi, départ pour Saint Martin où nous avons l'espoir de rejoindre Pontus, le bateau du cousin Xavier sur lequel sont ma tante Caroline et mon cousin Romain. Petite nav de 4h au travers, avec une arrivée dans un dégradé de bleus à se jeter par-dessus bord! On mouille côté français à Marigot, malheureusement Pontus est déjà en vadrouille à St Barth. On descend faire un petit tour d'horizon à terre. Rappelez-vous, en septembre dernier, Irma avait attaqué St Martin de plein fouet. 6 mois après, on reste sous le choc des dégâts encore si saillants. Autour du lagon et en bord de mer, qui furent un jour un centre névralgique du yachting et du tourisme de luxe, tout est encore débris et gravats. Une marina fantôme, des maisons éventrées, et une jeunesse qui "zone". On a pas très envie de traîner là la nuit. Quelques rares entrepreneurs tenaces ont néanmoins réouvert leurs commerces. Mais par exemple je ne trouverai pas de pain.
En revanche, Momo revient agréablement surpris de son petit tour des chantiers et shipchandlers. On sera bien mieux servis ici qu'au Marin, tarifs, délais, disponibilité et amabilité - amis navigateurs, prenez note! Et en plus, cela permet de participer à l'économie d'une île qui veut se relever au plus vite.
Nous avons rendez-vous avec Pontus à Anguilla, l'île juste en face, le mercredi, 14 mars. Mon petit Xavier se surpasse désormais, il nous démonte le vérin du pilote - qui se trouve dans un endroit inaccessible pour un adulte sous la barre à roue - en 2 minutes top-chrono, je le remonte avec une pièce de rechange et hop, 2 minutes plus tard, le vérin est de nouveau en place et en état de fonctionner! Wahou!
A notre arrivée, Caroline, Xavier et Romain se jettent littéralement à l'eau pour venir nous voir. Hum, hum... il va falloir démonter Jules pour avoir une échelle de bain! Retrouvailles familiales inattendues, on rattrape les quelques années de nouvelles autour d'un dîner sur Pontus. Le lendemain, les formalités d'entrée nous dissuadent de rester beaucoup plus sur cette île... Le seul endroit gratuit est celui-ci, Road Bay, pour le moindre autre mouillage, il faut débourser $56USD par jour!! Et le permis expirant à minuit, passer une nuit au mouillage ailleurs, c'est 2j de permis! On comprend qu'Anguilla est une île de milliardaires, qu'ils ne veulent pas trop de marins-bitniks comme nous. D'ailleurs, nous sommes assez épatés de voir tous les édifices en plutôt bon état malgré le passage d'Irma. Ici il y a du $$...
Ça tombe bien, on a tous envie d'aller découvrir les Iles Vierges britanniques! Pontus part le jour même. Nous, nous vidons nos poches de nos derniers Eastern Carribean Dollars (une monnaie utilisée dans la plupart des iles anglo-saxonnes, mais c'est la dernière sur notre trajet) dans un resto-plage idyllique, journée détente et baignade dans une eau turquoise avant de se refaire une nav de nuit. Nous voulons assurer le coup et être certains d'arriver de jour.
La nav vers les BVI (British Virgin Islands) sera une vraie plaie; plein vent arrière, ce qui nous oblige à tirer des bords car nous n'avons pas de spi. Et à moins de 15kn de vent, on n'avance plus... on fait une moyenne de 4kn, c'est loooooong. Ni dauphin, ni baleine, un trafic extrêmement stressant toute la nuit, mais heureusement un plafond d'étoiles. Et les vagues nous portent, c'est plus confortable. Record de non-vitesse, on fera les 75 milles en 24h!
A l'approche de l'archipel, on cherche à rejoindre Pontus; pas de réponse sur le canal 06, et les téléphones ne marchent pas. Mais miracle, un bato-copain nous dit les avoir vus rentrer dans le Gorda Sound. Ça tombe bien, on est devant la passe, et ils sont là!
A nous les BVI!!